5 choses à savoir sur le covid-19 avec l’expert des virus à Reims
Publié par Association Communicasciences, le 12 mars 2020 1.5k
Laurent Andreoletti, professeur de virologie à l’université de médecine de Reims, a répondu, lors d’une conférence, aux principales questions que l’on peut se poser sur la maladie.
Responsable du laboratoire de virologie du CHU, Laurent Andreoletti tenait une conférence sur le coronavirus mardi soir, à la faculté de médecine de Reims, devant près de 150 personnes. Une audience deux fois plus importante que d’habitude, preuve que le sujet intrigue autant qu’il inquiète. Après quelques mots sur la variole, « le seul virus qu’on a réussi à éradiquer de la surface de la Terre » ou la polio, en voie d’éradication, Laurent Andreoletti a évoqué l’apparition des « coronavirus saisonniers » en 2004, qui « tuent chaque année 600 personnes, sans qu’on en parle » forcément.
Comment s’appelle le virus et d’où vient-il ?
« Le covid-19 est le nom de la maladie, et le coronavirus, celui de la famille de virus. Le nouveau virus, lui, s’appelle le SARS-CoV-2 », précise le virologue. Son origine ? Moins farfelue que ce qu’on peut lire sur Internet. « Contrairement à certaines fake news qu’on peut lire, les virus ne viennent pas des extraterrestres, de la CIA ou des yakusas ! Ce virus n’a pas non plus été créé en laboratoire. Il est d’origine animale. L’épicentre est le marché de Wuhan, en Chine, où des animaux vivants sont vendus. Le virus vient de la chauve-souris, “l’animal-réservoir”, et a probablement été transmis par un autre animal, “l’hôte intermédiaire”, le pangolin. » Il s’agit d’un petit mammifère à écailles, protégé mais braconné et consommé. Paradoxalement, il devra peut-être sa survie à la maladie.
À quel point le virus est-il contagieux et dangereux ?
« Il faut relativiser, assure le virologue. La pire maladie, c’est la rougeole, avec un cas pouvant contaminer 15 à 20 personnes, et 180 000 morts dans le monde en 2018 (3 en France). Avec le coronavirus, un patient peut infecter entre 1,4 et 3,8 personnes. » Les signes cliniques sont la fièvre, les maux de tête, la fatigue ou encore la diarrhée. « Mais des personnes vont l’avoir et ne s’en rendront même pas compte. Entre 40 et 60 % des patients n’auront aucun symptôme ; 30 % auront les symptômes de la grippe ; 10 % auront ceux d’une pneumopathie. Le taux de létalité est de 2 à 3 %, pour des problèmes respiratoires. Les sujets les plus touchés sont les personnes âgées, pas les jeunes, qui semblent avoir une immunité contre les coronavirus saisonniers. » Enfin, Laurent Andreoletti précise : « On peut freiner l’épidémie, mais on ne peut pas l’arrêter. Par contre, plus le virus circule, moins il est virulent. En se propageant, le SARS-Cov-2 s’affaiblit et perd en dangerosité. »
Y a-t-il des pays épargnés ?
Difficile à dire. Il s’agit officiellement d’une pandémie, une épidémie touchant toute la planète, mais des pays n’apparaissent pas sur les écrans radars. Le virologue met en garde : « On voit des pays où il n’y aurait pas de cas, en Afrique par exemple. Ce sont surtout des pays pauvres, qui n’ont pas les moyens de faire les dépistages, et surtout qui font face à des maladies beaucoup plus meurtrières, comme le choléra ou le paludisme. » Autrement dit, le nouveau virus pourrait être partout, même là où on ne l’a pas trouvé.
Comment se protéger ?
Ne rêvez pas d’un vaccin. « Il n’y en aura pas avant deux ans, le temps de faire les tests », assure Laurent Andreoletti. Il évoque des « expériences en cours ». Mais le plus efficace est de mettre en place « des mesures barrières individuelles ». « Le premier mode de transmission humaine, ce sont les mains, r aison pour laquelle il faut tousser dans son coude, ne pas se faire la bise ou se serrer la main, et se laver les mains régulièrement et correctement, comme les chirurgiens, pendant au moins 30 secondes. »
Que peut faire le CHU de Reims ?
« Depuis lundi, on peut faire les dépistages au CHU. C’est très important, notamment pour la qualité de la prise en charge des patients. Jusqu’à présent, ils étaient envoyés à Nancy. On a d’ailleurs repris des patients qui avaient été envoyés là-bas, car l’hôpital de Nancy était saturé. »Parmi eux, un homme de 38 ans décédé dans la journée de mercredi, seule victime à ce jour parmi les sept Marnais contaminés.